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Didactirun
6 août 2015

Une notion, un jour...

Limite et frontière

Pour une première approche

La frontière marque les limites entre deux domaines différents. Il peut s’agir de frontières politiques (entre États), naturelles (une montagne, un fleuve). La frontière peut également délimiter des entités plus abstraites : frontières linguistiques, culturelles, etc. La frontière n’est plus considérée comme une séparation mais plutôt comme un lien entre deux espaces (interface).

Quelques précisions

À l’origine, la frontière est un terme militaire désignant la zone de contact (« le front ») entre deux armées. À partir du XVIIe siècle, avec la frag­mentation politique en Europe et l’apparition d’États-nations, la notion de frontière devient politique et exprime l’appropriation d’un territoire par un État. Très souvent, cette frontière politique repose sur une limite « naturelle » (concept de « frontière naturelle »). Un fleuve, une ligne de crête, une ligne de partage des eaux, etc. : le tracé résulte de tractations et de rapports de forces qui rendent les frontières artificielles. Dans de nombreux manuels de cycle 3 se retrouve l’idée que les limites du terri­toire national se superposent idéalement à des frontières prétendument naturelles. La frontière du nord-est nous prouve le contraire. Totalement artificielle, elle est le résultat d’un compromis avec les groupes politiques voisins (flamand au nord-ouest et germanique au nord-est). Les frontières naturelles qui délimitent le continent européen sont tout aussi abstraites.

La frontière a deux effets spatiaux majeurs : elle peut représenter un obstacle aux communications et aux échanges entre deux États en impo­sant des restrictions au passage des biens, des capitaux ou des personnes. Cette discontinuité est, en fonction des contextes, plus ou moins marquée. Le mur de Berlin a constitué jusqu’en 1989 une véritable « frontière-obs­tacle ». La frontière peut également jouer le rôle d’interface (voir p. 238) en attirant les hommes et les activités et en permettant le développement de ports, de villes commerciales, industrielles, etc. Au lieu de séparer, elle permet la réunion des hommes et la mise en place d’une véritable dyna­mique d’espaces transfrontaliers. L’histoire des frontières françaises montre bien qu’elles ont été plus souvent des aires d’échanges que des barrières. Au sud-est, les relations avec le monde méditerranéen furent précoces et soutenues : les croisades des XIIe et XIIIe siècles ne sauraient faire oublier les relations commerciales et intellectuelles avec le Proche-Orient. L’expansion coloniale en Afrique a, elle, permis de tisser des liens culturels et politiques qui ont survécu à la décolonisation. À l’est, les frontières se sont ouvertes et fermées au gré de conflits parfois sanglants. Les relations avec l’axe rhénan ont cependant toujours existé. L’ouest a longtemps symbolisé la limite inaccessible du territoire (à tel point que le terme de finistère désigne dans le langage courant un bout du monde). Les grandes découvertes de la Renaissance, l’expansion coloniale et les rela­tions avec le continent américain ont prouvé la force et la persistance des relations avec un autre monde.

Aujourd’hui, il n’est pas rare de lire que les regroupements supranatio­naux et la mondialisation sup­priment l’obstacle des frontières. Certes, les accords de libre-échange, la stratégie planétaire des firmes multinationales, la multiplication des flux immatériels (informations, financiers) tendent à effacer la notion de fron­tière. Pourtant, on note depuis quelques années une nouvelle crispation autour de cette « limite ». Dans un contexte économique difficile et face à une situation internationale tendue, les flux de population sont de plus en plus surveillés et contrôlés. Il y a donc un paradoxe qui veut qu’aujour­d’hui les produits circulent plus facilement que les hommes.

Liens avec les programmes

Le programme de cycle 3 insiste sur la différenciation des espaces à ana­lyser. L’élève doit être capable d’identifier les grands contrastes de la planète. Les objectifs de distinction, de limite, d’opposition sont donc très présents. L’échelle européenne est certainement celle qui se prête le mieux à l’analyse de la notion de frontière. Se pose en premier lieu la question des frontières du continent européen. La fragmentation politique du conti­nent en une multitude d’États aux frontières parfois récentes permet éga­lement d’aborder la notion de « frontière limite séparative ». Enfin, la construction d’une communauté d’États offre l’occasion d’insister sur les logiques d’effacements des frontières. 

Capture d’écran 2015-08-06 à 09

 Figure : Deux modèles frontaliers (d’après Rémy Knafou, Occuper et aménager la Terre. Classe de seconde, Paris, Belin, 2001)

Citations

Le mot frontière est un mot borgne, l’homme à deux yeux pour voir le monde. (Paul Eluard)

Le monde de la réalité a ses limites ; le monde de l’imagination est sans frontières. (Jean-Jacques Rousseau)

Pour aller plus loin

Di Méo Guy, Limites et discontinuités en géographie, Paris, SEDES, 2002.

Gay Jean-Christophe, Les Discontinuités spatiales, Paris, Economica, 1995.

Picouet Patrick et Renard Jean-Pierre, Les Frontières mondiales. Origines et dynamiques, Nantes, Éditions du Temps, 2007.

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