Une notion, un jour...
Pour les collègues PE
Aménagement du territoire
L’aménagement du territoire correspond à une politique qui vise à répartir harmonieusement les hommes et les activités dans l’espace, en corrigeant les déséquilibres régionaux.
Si l’on définit le territoire comme une portion d’espace qu’une société s’est appropriée, il n’est de territoire qu’aménagé, même superficiellement. Toute appropriation se traduit par un usage du territoire qu’il marque et qu’il façonne, ne serait-ce que de manière très lâche. L’aménagement est alors l’action volontaire et réfléchie d’une collectivité conduisant à une modification du territoire, ainsi que le résultat de cette action.
La nécessité d’une politique d’aménagement du territoire naît de déséquilibres ; il serait illusoire d’attendre leur résorption sans action volontariste des pouvoirs publics. La tendance spontanée est au contraire à l’aggravation des situations difficiles, les espaces isolés et mal reliés aux réseaux de communication étant placés dans des conditions concurrentielles de plus en plus contraignantes.
Tous les gouvernements, même les plus libéraux, ne se privent pas d’agir sur les territoires dont ils ont la charge. Cette action passe le plus souvent par une politique différentielle d’aides et de dégrèvements, de prise en charge d’équipements et d’infrastructures, d’incitation à la relocalisation d’activités (on préférera le terme de re-localisation à celui de dé-localisation, qui tend à nier la dimension spatiale, pourtant essentielle, du phénomène). Elle a surtout pour objectif de réduire les disparités spatiales en améliorant les performances de certains lieux. Le dilemme se situe alors entre une politique de soutien aux espaces en difficulté et une politique d’investissements prioritaires dans les espaces les plus performants au bénéfice de la collectivité.
La mise en place d’une politique d’aménagement du territoire est complexe et peut conduire à des effets inverses de ceux qui sont recherchés ou aux objectifs ouvertement affichés. L’aménagement d’un réseau autoroutier aurait pour effet de désenclaver les régions les plus reculées et de les mettre à égalité avec les espaces mieux lotis sur le plan de la concurrence économique. Pourtant, les aménagements ne profitent pas toujours aux régions traversées (« effet tunnel »).
Selon les auteurs du dictionnaire critique Les Mots de la géographie (Roger Brunet, Robert Ferras et Hervé Théry, Reclus–La Documentation Française, 2003), trois constantes semblent se dégager des politiques d’aménagement du territoire suivies. La première est que « l’aménagement du territoire ne règle jamais directement les disparités entre les centres et les périphéries ». Quelles qu’aient été les mesures prises par les gouvernements successifs de la IVe et de la Ve Républiques, Paris n’a guère cédé de son pouvoir de commandement et de sa richesse économique à la province. La deuxième est qu’il serait illusoire, sinon coupable, de penser que l’aménagement du territoire doit se fonder sur des aptitudes naturelles et invariables des espaces. « La division spatiale du travail est spontanée, momentanée, changeante. » La troisième, enfin, est que « l’aménagement du territoire ne se fait réellement que dans les mailles ordinaires de sa gestion », c’est-à-dire en prenant en compte la réalité des pouvoirs territoriaux organisés.
Après avoir longtemps mené une politique volontariste (les grands aménagements touristiques et industriels, la maîtrise du développement urbain), depuis les années 1970 un effort de reconversion et de protection est mené (la préservation de l’environnement avec la création des parcs nationaux ou régionaux, ou la réhabilitation des friches industrielles). Par ailleurs, l’État a longtemps été le seul à décider des actions d’aménagement ; la Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale (DATAR) était à la base de cette politique. La décentralisation permet depuis 1982 de transférer une partie des ressources financières en direction des communes, des départements et des Régions. Aujourd’hui, l’Union européenne joue un rôle de plus en plus important dans l’aménagement du territoire. Elle se préoccupe de résoudre les inégalités territoriales.
Le tableau retrace les grandes logiques qui sous-tendent l’aménagement du territoire français, des acteurs aux outils en passant par les objectifs.
Tensions |
Inégalités |
Dynamiques sociospatiales |
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Accessibilité |
Différentiels de développement |
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Échelles |
Congestion |
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Enclavement |
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Local/mondial |
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Paris/France |
Acteurs |
Entrepreneurs |
Personnes privées |
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Petites et moyennes entreprises |
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Entreprises multinationales |
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Services |
Administrations |
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Services financiers |
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Réseaux de distribution |
Principes |
Conciliation |
Logique de marché |
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Logique de service public |
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Régulation |
Équité territoriale |
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Subsidiarité |
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Protection |
Développement durable |
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Solidarité |
Objectifs |
Réduction des inégalités |
Reconversion des espaces en crise |
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Reviviscence des espaces abandonnés |
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Favoriser la compétitivité |
Appuis à l’émergence d’activités nouvelles |
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Accueil d’investissements extérieurs |
Outils |
Institutions |
Ministère |
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DIACT (Délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires) |
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Collectivités territoriales |
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Cadre légal |
Lois |
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Schémas directeurs |
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Financement |
Budget de l’État |
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Budget des collectivités territoriales |
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Fonds structurels européens |
D’après Benjamin Steck et Jean-Fabien Steck, La France et ses régions en Europe et dans le monde, Paris, Bréal, 2002.
Cette notion est surtout présente dans le deuxième et le troisième blocs du programme (« Regards sur les espaces européens » et « Le territoire français »), lorsque sont abordées les dynamiques européennes et les caractéristiques du territoire français.
La France est un territoire à ménager. (Roger Brunet)
Aménager le territoire, c’est prendre conscience de l’espace comme richesse et comme devoir. (Edgard Pisani)
Pour aller plus loin
Brunet Roger, Le Développement des territoires. Formes, lois, aménagement, La Tour-d’Aigues, L’Aube, 2005.
Guigou Jean-Louis, Aménager la France de 2020, Paris, La Documentation Française, 2000.
Limouzin Pierre, La France et ses régions. Inégalités et mutations, Paris, Armand Colin, 2000.